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Accord entre le Canada et la France portant concession au Canada de l'usage d'un terrain sur le plateau de Vimy destiné à l'érection d'un monument à la mémoire des soldats canadiens tombés au champ d'honneur en France (guerre 1914-1918)
F102661
Cet accord, rédigé le 5 décembre 1922, a été établi par et entre le Gouvernement français, représenté par M. Charles Reibel, Ministre des Régions Libérées, d'une part, et le Gouvernement du Canada, représenté par Monsieur Rodolphe Lemieux, Président de la Chambre des Communes du Canada, d'autre part.
Étant donné que le Gouvernement du Canada désire ériger sur le plateau de Vimy (Pas-de-Calais), au centre d'un parc de 100 hectares qu'il se propose d'aménager et dont il assumera l'entretien, un monument à la mémoire des soldats Canadiens tombés au champ d'honneur en France, au cours de la guerre 1914-1918, le Gouvernement français met à sa disposition le terrain nécessaire dont la propriété restera à l'État français.
Étant donné, d'autre part, que la France désire s'associer à l'hommage que le Canada se propose de rendre à ses morts de la grande guerre et que, par ailleurs, le terrain dont il s'agit, compris dans la zone rouge, doit être acquis par l'État français, conformément aux prescriptions de l'article 46, paragraphe 7, de la loi du 17 avril 1919 :
Article premier
Le Gouvernement français concède, gratuitement et à perpétuité, au Gouvernement du Canada l'usage et la libre disposition d'un terrain de 100 hectares sis sur le plateau de Vimy dans le département du Pas-de-Calais et dont les limites sont définies par le plan annexé au présent accord.
Article II
Le Gouvernement du Canada s'engage à aménager ce terrain en parc et à y ériger un monument à la mémoire des soldats Canadiens tombés au Champ d'honneur en France au cours de la guerre 1914-1918.
Il s'engage, en outre, à assurer l'entretien du parc et du monument, à défaut de quoi, le Gouvernement français reprendrait la libre disposition du parc, à l'exclusion toutefois du terrain où sera élevé le monument commémoratif.
Article III
Le terrain concédé au Gouvernement du Canada par le présent accord sera exonéré de toutes taxes et impositions. Le Gouvernement français fera son affaire de toutes les difficultés pouvant s'élever avec les riverains autres que celles qui résulteraient de dommages causés par du personnel ou du matériel appartenant au Gouvernement du Canada et maintenu en France pour l'entretien et la garde du parc et du monument.
Article IV
Seront obligatoirement mentionnées sur le monument toutes les unités de même ordre de l'armée canadienne ayant combattu sur le plateau de Vimy dans une même période de temps.
Article V
Le présent accord ne deviendra définitif que par le vote, par le Parlement, du projet de loi portant approbation de ses dispositions que le Gouvernement français a déposé sur le bureau de la Chambre.
En foi de quoi, le jour et l'année au début précités, cet accord a été rédigé en quatre exemplaires, chacun d'eux ayant la même valeur et effet qu'un original, par le Gouvernement français, représenté par M. Charles Reibel, Ministre des Régions Libérées, et le Gouvernement du Canada, représenté par M. Rodolphe Lemieux, Président de la Chambre des Communes du Canada.
Charles Reibel
Rodolphe Lemieux
Appendice 1
Résolution portant approbation de l'acceptation par le Gouvernement d'un don fait par la France d'un terrain sur le plateau de Vimy, adoptée par la chambre des communes et par le sénat du Canada respectivement les 9 et 28 février 1923.
Le Parlement approuve l'acceptation par le gouvernement du Canada du don gracieux que la République française lui fait d'un terrain de deux cent cinquante acres d'étendue sur le plateau de Vimy, à l'endroit choisi par le Canada pour l'érection d'un monument commémorant les exploits des soldats Canadiens au cours de la Grande Guerre; et, en ce faisant, il exprime la reconnaissance et l'admiration que lui inspirent les motifs qui ont engagé la France à s'associer à un projet si profondément cher au coeur du peuple Canadien, de la manière qui convient à Votre Excellence pour traduire ces sentiments au Président de la République Française.
Appendice 2
Loi portant approbation de l'Accord conclu, le 5 décembre 1922, entre le Gouvernement français et le Gouvernement du Canada et relatif à la concession à ce Gouvernement, sur le plateau de Vimy, de l'usage et de la libre disposition d'un terrain de 100 hectares, destiné à l'aménagement d'un parc et à l'érection d'un monument à la mémoire des soldats canadiens tombés au champ d'honneur, en France, au cours de la guerre 1914-1918
Le Sénat et la Chambre des députés ont adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
Article unique
Est approuvé l'accord conclu, le 5 décembre 1922, entre le Gouvernement français, représenté par M. Charles Reibel, ministre des régions libérées, et le Gouvernement du Canada, représenté par M. Rodolphe Lemieux, président de la Chambre des Communes du Canada, relatif à la concession à ce gouvernement, sur le plateau de Vimy, de l'usage et de la libre disposition d'un terrain de 100 hectares destiné à l'aménagement d'un parc et à l'érection d'un monument à la mémoire des soldats Canadiens tombés au champ d'honneur, en France, au cours de la guerre 1914-1918.
Le texte du dit accord demeurera annexé à la présente loi,
La présente loi, délibérée et adoptée par le Sénat et par la Chambre des députés, sera exécutée comme loi de l'État.
FAIT à Paris, le 24 juin 1927.
Gaston Doumergue
Par le Président de la République :
Le président du Conseil,
Ministre des finances,
Raymond Poincare
Le ministre des affaires étrangères,
Aristide Briand
Appendice 3
Aide-mémoire du Colonel H.C. Osborne, Secrétaire de la Commission des monuments commémoratifs des champs de Bataille canadiens, concernant l'acquisition de terrain pour l'érection d'un monument commémoratif sur le plateau de Vimy, lu au sénat canadien le 9 mars 1923.
- En droit français, nul gouvernement étranger n'est habile à acquérir un titre de propriété sur un bien-fonds situé en France ni à ériger des constructions sur ce bien-fonds.
C'est ce qu'ont déclaré le Vice-Président de la Commission Impériale des Tombes de Guerre (Imperial War Graves Commission) et l'avocat-conseil de la Commission Canadienne. La Commission Impériale des Tombes de Guerre a acquis une grande expérience en procédant à l'acquisition de terrains en France et en Belgique pour environ 2000 cimetières militaires britanniques.
- Les dispositions de l'Accord intervenu entre les Gouvernements français et canadien concernant le don fait au Canada d'un terrain sur le plateau de Vimy sont virtuellement les mêmes que celles relatives au don fait par le Gouvernement français de terrains pour les cimetières militaires britanniques; à savoir le terrain doit être acquis par le Gouvernement français aux frais de la nation française, qui en garde la possession à perpétuité, pour l'usage du Gouvernement canadien pour une fin donnée, laquelle est l'érection d'un monument et la création d'un parc.
- Les conditions attachées au don répondaient absolument aux vues des représentants canadiens. On n'a pas jugé devoir lier le Gouvernement canadien par des engagements précis. C'était et c'est encore l'intention du Gouvernement canadien d'ériger un monument commémoratif sur le plateau de Vimy; mais il a fallu tenir compte du fait que les gouvernements peuvent changer de dessein, ou que des circonstances imprévues peuvent surgir. D'autre part, il a fallu tenir compte du fait que le don était consenti dans un but déterminé, à l'exclusion de tout autre. Il a semblé que la forme la meilleure et la plus efficace que le don pouvait prendre était la forme adoptée dans le cas de concessions de cimetières militaires, à savoir la concession au Gouvernement canadien, à titre gratuit et à perpétuité, du libre usage du terrain pour l'objet prévu. On écarta à l'avance toute difficulté ou complication qui pourrait survenir, en prévoyant simplement que, s'il arrivait au Gouvernement canadien de modifier ses plans, le Gouvernement français reprendrait la libre disposition du terrain - sous réserve, toutefois, de cette partie du terrain sur lequel s'élèverait le monument, si ce dernier était érigé dans l'intervalle.
- En outre, le don comprend une superficie de 100 hectares (250 acres). Les représentants du Canada se trouvaient dans l'impossibilité d'indiquer avec précision de quelle étendue de terre on aurait besoin. Il est probable que le parc projeté couvrira une superficie beaucoup moindre. Dans ce cas, toute portion de terrain non utilisé fera simplement retour au gouvernement français.
A ce propos, l'emploi du mot "parc" est peut-être de nature à induire en erreur. Le plateau de Vimy couvre une surface de plusieurs milles dénudée, ravagée, creusée de trous d'obus, etc. La Commission se propose de réserver et de mettre en état convenable assez de terrain pour servir d'assiette au monument et empêcher l'érection de constructions disgracieuses dans le voisinage. Tout autre terrain qui pourra être réservé pour le "parc" projeté sera laissé en grande partie dans son état actuel. On se contentera probablement d'y faire du reboisement, d'y planter des arbres, et d'y ouvrir des routes ou des sentiers menant au monument. On n'envisage pas de faire de grandes dépenses pour cela.
Quant à l'entretien, il est très probable, que, dans quelques années, l'entretien du terrain entourant tous les monuments commémoratifs britanniques en France sera laissé aux soins de la Commission Impériale des Tombes de Guerre. Cette Commission est une institution permanente qui aura toujours un personnel sur place pour l'entretien des cimetières militaires.
- Le gouvernement français n'a imparti aucun délai pour l'achèvement des travaux, ni imposé aucune condition relativement à l'étendue ou à la nature de parc à entretenir.
- Un comité spécial de la Chambre des Communes a fait l'étude, en avril 1920, d'un projet visant à l'érection de huit monuments commémoratifs sur les champs de bataille retenus de France et de Belgique. Le Parlement a, par la suite, adopté le rapport de ce comité.
Sur la recommandation du Comité, la Commission Canadienne des Monuments Commémoratifs des Champs de Bataille a été constitué comme suit :
L'hon. Major-Général S.C. Mewburn, C.M.G., C.R., M.P.,
L'hon. Monsieur Rodolphe Lemieux, C.R., M.P.,
Le Lieutenant-Général Sir R.E.W. Turner, C.V., K.C.B., etc.,
Le Lieutenant-Colonel R.W. Léonard,
L'hon Monsieur J.G. Turriff,
Le Secrétaire honoraire: le Colonel H.C. Osborne, C.M.G.
La Commission a vu s'élargir son champ d'action récemment du fait de deux propositions tendant l'une, à l'acquisition par le Canada d'un terrain sur le plateau de Vimy, et l'autre, à la commémoration sur le monument de Vimy d'une grande proportion (15,000 peut-être) des disparus canadiens, c'est-à-dire, de ceux qui ont perdu la vie et n'ont pas eu de sépulture.
En ce qui concerne la première proposition précitée, la dépense tombera sous le contrôle de la Commission des Champs de Bataille Canadiens. Les dépenses de la Commission doivent être approuvées par le Ministre de la Milice, et, en dernier ressort, par le Parlement. En ce qui concerne en seconde proposition, la Commission Impériale des Tombes de Guerre contribuera dans une bonne mesure au coût du monument commémoratif de Vimy. Cette Commission est chargée en premier lieu de l'érection de monuments commémoratifs aux disparus, et comme le Canada la relève de cette obligation dans la mesure mentionnée plus haut, il y aura règlement de comptes en conséquence. Cette question fait présentement l'objet de négociations entre la Commission Impériale des Tombes de Guerre et le Haut-Commissaire du Canada à Londres.
H. C. Osborne,
Colonel,
Secrétaire Honoraire de la Commission des Monuments Commémoratifs
de Champs de Bataille Canadiens